Paul Valéry
(1871-1945)
Propos Sur La Poésie
Nous venons aujourd’hui vous entretenir de la poésie. Le sujet est à la mode. Il
est admirable que, dans une époque qui sait être à la fois pratique et dissipée,
et que l’on pourrait croire assez détachée de toutes choses spéculatives, tant
d’intérêt soit accordé non seulement à la poésie même, mais encore à la théorie
poétique.
Je me permettrai donc aujourd’hui d’être quelque peu abstrait ; mais, par là, il
me sera possible d’être bref.
Je vous proposerai une certaine idée de la poésie, avec la ferme intention de ne
rien dire qui ne soit de pure constatation, et que tout le monde ne puisse
observer en soi-même ou par soi-même, ou, du moins, retrouver par un
raisonnement facile.
Je commencerai par le commencement. Le commencement de cette exposition d’idées
sur la poésie consistera nécessairement à considérer ce nom même, tel qu’il est
employé dans le discours usuel. Nous savons que ce mot a deux sens, c’est-à-dire
deux fonctions bien distinctes. Il désigne d’abord un certain genre d’émotions,
un état émotif particulier, qui peut être provoqué par des objets ou des
circonstances très diverses. Nous disons d’un paysage qu’il est poétique ; nous
le disons d’une circonstance de la vie ; nous le disons parfois d’une personne.
Mais il existe une seconde acception de ce terme, un second sens plus étroit.
Poésie, en ce sens, nous fait songer à un art, à une étrange industrie dont
l’objet est de reconstituer cette émotion que désigne le premier sens du mot.
Restituer l’émotion poétique à volonté, en dehors des conditions naturelles où
elle se produit spontanément et au moyen des artifices du langage, tel est le
dessein du poète, et telle est l’idée attachée au nom de poésie, pris dans le
second sens.
Entre ces deux notions existent les mêmes relations et les mêmes différences que
celles qui se trouvent entre le parfum d’une fleur et l’opération du chimiste
qui s’applique à le reconstruire de toutes pièces.
Toutefois, on confond à chaque instant les deux idées, et il en résulte qu’une
quantité de jugements, de théories et même d’ouvrages sont viciés dans leur
principe par l’emploi d’un seul mot pour deux choses bien différentes, quoique
liées.
Parlons d’abord de l’émotion poétique, de l’état émotif essentiel.
Vous savez ce que la plupart des hommes éprouvent plus ou moins fortement et
purement devant un spectacle naturel qui leur impose. Les couchers de soleil,
les clairs de lune, les forêts et la mer nous émeuvent. Les grands événements,
les points critiques de la vie affective, les troubles de l’amour, l’évocation
de la mort, sont autant d’occasions ou de causes immédiates de retentissements
intimes plus ou moins intenses et plus ou moins conscients.
Ce genre d’émotions se distingue de toutes autres émotions humaines. Comment
s’en distingue-t-il ? C’est ce qu’il importe à notre dessein actuel de
rechercher. Il nous importe d’opposer aussi nettement que possible l’émotion
poétique à l’émotion ordinaire. La séparation est assez délicate à opérer, car
elle n’est jamais réalisée dans les faits. On trouve toujours mêlées à l’émoi
poétique essentiel la tendresse ou la tristesse, la fureur ou la crainte ou
l’espérance ; et les intérêts et les affections particuliers de l’individu ne
laissent point de se combiner à cette sensation d’univers qui est
caractéristique de la poésie.
J’ai dit : sensation d’univers. J’ai voulu dire que l’état ou émotion poétique
me semble consister dans une perception naissante, dans une tendance à percevoir
un monde, ou système complet de rapports, dans lequel les êtres, les choses, les
événements et les actes, s’ils ressemblent, chacun à chacun, à ceux qui peuplent
et composent le monde sensible, le monde immédiat duquel ils sont empruntés,
sont, d’autre part, dans une relation indéfinissable, mais merveilleusement
juste, avec les modes et les lois de notre sensibilité générale. Alors, ces
objets et ces êtres connus changent en quelque sorte de valeur. Ils s’appellent
les uns les autres, ils s’associent tout autrement que dans les conditions
ordinaires. Ils se trouvent, – permettez-moi cette expression, – musicalisés,
devenus commensurables, résonants l’un par l’autre. L’univers poétique ainsi
défini présente de grandes analogies avec l’univers du rêve.
Puisque ce mot de rêve s’est introduit dans mon discours, je dirai au passage
qu’il s’est fait dans les temps modernes, à partir du Romantisme, une confusion
assez explicable, mais assez regrettable, entre la notion de poésie et celle de
rêve. Ni le rêve, ni la rêverie ne sont nécessairement poétiques. Ils peuvent
l’être ; mais des figures formées au hasard ne sont que par hasard des figures
harmoniques.
Toutefois, le rêve nous fait comprendre par une expérience commune et fréquente,
que notre conscience puisse être envahie, emplie, constituée par un ensemble de
productions remarquablement différentes des réactions et des perceptions
ordinaires de l’esprit. Il nous donne l’exemple familier d’un monde fermé où
toutes choses réelles peuvent être représentées, mais où toutes choses
paraissent et se modifient par les seules variations de notre sensibilité
profonde. C’est à peu près de même que l’état poétique s’installe, se développe
et se désagrège en nous. C’est dire qu’il est parfaitement irrégulier,
inconstant, involontaire, fragile, et que nous le perdons comme nous l’obtenons,
par accident. Il y a des périodes de notre vie où cette émotion et ces
formations si précieuses ne se manifestent pas. Nous ne pensons même pas
qu’elles soient possibles. Le hasard nous les donne, le hasard nous les retire.
Mais l’homme n’est homme que par la volonté et la puissance qu’il a de conserver
ou de rétablir ce qu’il lui importe de soustraire à la dissipation naturelle des
choses. L’homme a donc fait pour cette émotion supérieure ce qu’il a fait ou
tenté de faire pour toutes les choses périssables et regrettables. Il a cherché,
il a trouvé des moyens de fixer et de ressusciter à son gré les plus beaux ou
les plus purs états de soi-même de reproduire, de transmettre, de garder pendant
des siècles les formules de son enthousiasme, de son extase, de sa vibration
personnelle ; et, par une conséquence heureuse et admirable, l’invention de ces
procédés de conservation lui a donné du même coup l’idée et le pouvoir de
développer et d’enrichir artificiellement les fragments de vie poétique dont sa
nature lui fait don par instants. Il a appris à extraire du cours du temps, à
dégager des circonstances, ces formations, ces perceptions merveilleuses
fortuites qui eussent été perdues sans retour, si l’être ingénieux et sagace ne
fût venu assister l’être instantané, apporter le secours de ses inventions au
moi purement sensible. Tous les arts ont été créés pour perpétuer, changer,
chacun selon son essence, un moment d’éphémère délice en la certitude d’une
infinité d’instants délicieux. Une oeuvre n’est que l’instrument de cette
multiplication ou régénération possible. Musique, peinture, architecture sont
les modes divers correspondant à la diversité des sens. Or, parmi ces moyens de
produire ou de reproduire un monde poétique, de l’organiser pour la durée et de
l’amplifier par le travail réfléchi, le plus ancien, peut-être, le plus
immédiat, et cependant le plus complexe, – c’est le langage. Mais le langage, à
cause de sa nature abstraite, de ses effets plus spécialement intellectuels, –
c’est-à-dire : indirects, – et de ses origines ou de ses fonctions pratiques,
propose à l’artiste qui s’occupe de le vouer et de l’ordonner à la poésie, une
tâche curieusement compliquée. Il n’y eût jamais eu de poètes si l’on eût eu
conscience des problèmes à résoudre. (Personne ne pourrait apprendre à marcher,
si pour marcher il fallait se représenter et posséder à l’état d’idées claires
tous les éléments du moindre pas.)
Mais nous ne sommes point ici pour faire des vers. Nous essayons, au contraire,
de considérer les vers comme impossibles à faire, pour admirer plus lucidement
les efforts des poètes, concevoir leur témérité et leurs fatigues, leurs risques
et leurs vertus, nous émerveiller de leur instinct.
Je vais donc en peu de mots tenter de vous donner quelque idée de ces
difficultés.
Je vous l’ai dit tout à l’heure : le langage est un instrument, un outil, ou
plutôt une collection d’outils et d’opérations formée par la pratique et
asservie à elle. Il est donc un moyen nécessairement grossier, que chacun
utilise, accommode à ses besoins actuels, déforme selon les circonstances,
ajuste à sa personne physiologique et à son histoire psychologique.
Vous savez à quelles épreuves nous le soumettons quelquefois. Les valeurs, les
sens des mots, les règles de leurs accords, leur émission, leur transcription
nous sont à la fois des jouets et des instruments de torture. Sans doute, nous
avons quelque égard aux décisions de l’Académie ; et sans doute, le corps
enseignant, les examens, la vanité surtout, opposent quelques obstacles à
l’exercice de la fantaisie individuelle. Dans les temps modernes, d’ailleurs, la
typographie agit très puissamment pour la conservation de ces conventions
d’écriture. Par là, les altérations d’origine personnelle sont retardées dans
une certaine mesure ; mais les qualités du langage les plus importantes pour le
poète, qui sont évidemment ses propriétés ou possibilités musicales, d’une part,
et ses valeurs significatives illimitées (celles qui résident à la propagation
des idées dérivées d’une idée), de l’autre, sont aussi les moins défendues
contre le caprice, les initiatives, les actions et les dispositions des
individus. La prononciation de chacun et son « acquis » psychologique
particulier introduisent dans la transmission par le langage, une incertitude,
des chances de méprises, un imprévu tout inévitables. Remarquez bien ces deux
points : en dehors de son application aux besoins les plus simples et les plus
communs de la vie, le langage est tout le contraire d’un instrument de
précision. Et en dehors de certaines coïncidences rarissimes, de certains
bonheurs d’expression et de forme sensible combinées, il n’a rien d’un moyen de
poésie.
En somme, le destin amer et paradoxal du poète lui impose d’utiliser une
fabrication de l’usage courant et de la pratique à des fins exceptionnelles et
non pratiques ; il doit emprunter des moyens d’origine statistique et anonyme
pour accomplir son dessein d’exalter et d’exprimer sa personne en ce qu’elle a
de plus pur et de singulier.
Rien ne fait mieux saisir toute la difficulté de sa tâche, que de comparer ses
données initiales avec celles dont dispose le musicien. Voyez un peu ce qui est
offert à l’un et à l’autre, au moment qu’ils vont se mettre à l’ouvrage et
passer de l’intention à l’exécution.
Heureux le musicien ! L’évolution de son art lui a fait une condition toute
privilégiée. Ses moyens sont bien définis, la matière de sa composition est tout
élaborée devant lui. On peut aussi le comparer à l’abeille quand elle n’a qu’à
s’inquiéter de son miel. Les rayons réguliers et les alvéoles de cire sont tout
faits devant elle. Sa tâche est bien mesurée et restreinte au meilleur d’elle-
même. Tel le compositeur. On peut dire que la musique préexiste et l’attend. Il
y a beau temps qu’elle est toute constituée !
Comment eut lieu cette institution de la musique ? Nous vivons par l’ouïe dans
l’univers des bruits. De leur ensemble se détache l’ensemble de bruits
particulièrement simples, c’est-à-dire bien reconnaissables par l’oreille et qui
lui servent de repères : ce sont des éléments dont les relations réciproques
sont intuitives ; ces relations exactes et remarquables sont perçues par nous
aussi nettement que leurs éléments eux-mêmes. L’intervalle de deux notes nous
est aussi sensible qu’une note.
Par là, ces unités sonores, ces sons, sont aptes à former des combinaisons
suivies, des systèmes successifs ou simultanés dont la structure, les
enchaînements, les implications, les entrecroisements nous apparaissent et
s’imposent. Nous distinguons nettement le son du bruit, et nous percevons dès
lors un contraste entre eux, impression de grande conséquence car ce contraste
est celui du pur et de l’impur, qui se ramène à celui de l’ordre et du désordre,
tient lui-même, sans doute, aux effets de certaines lois énergétiques. Mais
n’allons pas si loin.
Ainsi, cette analyse des bruits, ce discernement qui a permis la constitution de
la musique comme activité séparée et exploitation de l’univers des sons, a été
accomplie, ou du moins contrôlée, unifiée, codifiée, grâce à l’intervention de
la science physique, qui s’est d’ailleurs découverte elle-même à cette occasion
et s’est reconnue comme science des mesures, et qui a su, dès l’Antiquité,
adapter la mesure à la sensation, et obtenir le résultat capital de produire la
sensation sonore de manière constante et identique, au moyen d’instruments qui
sont, en réalité, des instruments de mesure.
Le musicien se trouve donc en possession d’un ensemble parfait de moyens bien
définis, qui font correspondre exactement des sensations à des actes ; tous les
éléments de son jeu lui sont présents, énumérés et classés, et cette
connaissance précise de ses moyens, dont il est non seulement instruit mais
pénétré et armé intimement, lui permet de prévoir et de construire, sans aucune
préoccupation au sujet de la matière et de la mécanique générale de son art.
Il en résulte que la musique possède un domaine propre, absolument sien. Le
monde de l’art musical, monde des sons, est bien séparé du monde des bruits.
Tandis qu’un bruit se borne à évoquer en nous un événement isolé quelconque, un
son qui se produit évoque à soi seul tout l’univers musical. Dans cette salle où
je parle, où vous percevez le bruit de ma voix et divers incidents auditifs, si
tout à coup une note se faisait entendre, si un diapason ou un instrument bien
accordé se mettait à vibrer, à peine affectés par ce bruit exceptionnel, qui ne
peut pas se confondre avec les autres, vous auriez aussitôt la sensation d’un
commencement. Une atmosphère tout autre serait sur-le-champ créée, un état
particulier d’attente s’imposerait, un ordre nouveau, un monde s’annoncerait et
vos attentions s’organiseraient pour l’accueillir. Davantage, elles tendraient
en quelque sorte à développer d’elles-mêmes ces prémisses, et à engendrer des
sensations ultérieures de même espèce, de même pureté que la sensation reçue.
Et la contre-épreuve existe.
Si, dans une salle de concert, pendant que résonne et domine la symphonie, il
arrive qu’une chaise tombe qu’une personne tousse, qu’une porte se ferme,
aussitôt nous avons l’impression de je ne sais quelle rupture. Quelque chose
d’indéfinissable, de la nature d’un charme ou d’un cristal, a été brisé ou
fendu.
Or, cette atmosphère, ce charme puissant et fragile, cet univers des sons est
offert au moindre compositeur par la nature de son art et par les acquisitions
immédiates de cet art.
Tout autre, infiniment moins heureuse, est la dotation du poète. Poursuivant un
objet qui ne diffère pas excessivement de celui que vise le musicien, il est
privé des immenses avantages que je viens de vous indiquer. Il doit créer ou
recréer à chaque instant ce que l’autre trouve tout fait et tout prêt.
En quel état défavorable et désordonné le poète trouve les choses ! Il a devant
soi ce langage ordinaire, cet ensemble de moyens si grossiers que toute
connaissance qui se précise le rejette pour se créer ses instruments de pensée ;
il doit emprunter cette collection de termes et règles traditionnelles et
irrationnelles, modifiés par quiconque, bizarrement introduits, bizarrement
interprétés, bizarrement codifiés. Rien de moins propre aux desseins de
l’artiste que ce désordre essentiel dont il doit extraire à chaque instant les
éléments de l’ordre qu’il veut produire. Il n’y a pas eu pour le poète de
physicien qui ait déterminé les propriétés constantes de ces éléments de son
art, leurs rapports, leurs conditions d’émission identique. Point de diapasons,
point de métronomes, point de constructeurs de gammes et de théoriciens de
l’harmonie. Aucune certitude, si ce n’est celle des fluctuations phonétiques et
significatives du langage. Ce langage d’ailleurs, n’agit point comme le son, sur
un sens unique, sur l’ouïe, qui est le sens par excellence de l’attente et de
l’attention. Il constitue, au contraire, un mélange d’excitations sensorielles
et psychiques parfaitement incohérentes. Chaque mot est un assemblage instantané
d’effets sans relation entre eux. Chaque mot assemble un son et un sens. Je me
trompe : il est à la fois plusieurs sons et plusieurs sens. Plusieurs sons,
autant de sons qu’il est de provinces en France et presque d’hommes dans chaque
province.
C’est là une circonstance très grave pour les poètes, dont les effets musicaux
qu’ils avaient prévus sont corrompus ou défigurés par l’acte de leurs lecteurs.
Plusieurs sens, car les images que chaque mot nous suggère sont généralement
assez différentes et leurs images secondaires infiniment différentes.
La parole est chose complexe, elle est combinaison de propriétés à la fois liées
dans le fait et indépendantes par leur nature et par leur fonction. Un discours
peut être logique et chargé de sens, mais sans rythme et sans nulle mesure ; il
peut être agréable à l’ouïe et parfaitement absurde ou insignifiant ; il peut
être clair et vain, vague et délicieux… Mais il suffit, pour faire concevoir
son étrange multiplicité, de nommer toutes les sciences qui se sont créées pour
s’occuper de cette diversité et en exploiter chacune un des éléments. On peut
étudier un texte de bien des façons indépendantes, car il est tour à tour
justiciable de la phonétique, de la sémantique, de la syntaxe, de la logique, de
la rhétorique, sans omettre la métrique, ni l’étymologie.
Voici le poète aux prises avec cette matière mouvante et trop impure ; obligé de
spéculer sur le son et sur le sens tour à tour, de satisfaire non seulement à
l’harmonie, à la période musicale, mais encore à des conditions intellectuelles
variées : logique, grammaire, sujet du poème, figures et ornements de tous
ordres, sans compter les règles conventionnelles. Voyez quel effort suppose
l’entreprise de mener à bonne fin un discours où tant d’exigences doivent se
trouver miraculeusement satisfaites à la fois.Ici commencent les opérations
incertaines et minutieuses de l’art littéraire. Mais cet art nous offre deux
aspects, il a deux grands modes qui, dans leur état extrême, s’opposent, mais
qui, toutefois, se rejoignent et s’enchaînent par une foule de degrés
intermédiaires. Il y a la prose et il y a le vers. Entre eux, tous les types de
leur mélange ; mais c’est dans leurs états extrêmes que je les considérerai
aujourd’hui. On pourrait illustrer cette opposition des extrêmes en l’exagérant
quelque peu : on dirait que le langage a pour limites la musique, d’un côté,
l’algèbre, de l’autre.
J’aurai recours à une comparaison qui m’est familière pour rendre plus facile à
saisir ce que j’ai à dire sur ce sujet. Un jour que je parlais de tout ceci dans
une ville étrangère, comme je m’étais servi de cette même comparaison, je reçus,
de l’un de mes auditeurs, une citation fort remarquable qui me fit voir que
l’idée n’était pas nouvelle. Elle ne l’était du moins que pour moi.
Voici la citation. C’est là un extrait d’une lettre de Racan à Chapelain, dans
laquelle Racan nous apprend que Malherbe assimilait la prose à la marche, la
poésie à la danse, comme je vais le faire tout à l’heure :
« Donnez, dit Racan, tel nom qu’il vous plaira à ma prose, de galante, de naïve,
d’enjouée. Je suis résolu de me tenir dans les préceptes de mon premier maître
Malherbe, et de ne chercher jamais ni nombre, ni cadence à mes périodes, ni
d’autre ornement que la netteté qui peut exprimer mes pensées. Ce bonhomme
(Malherbe) comparait la prose à la marche ordinaire et la poésie à la danse, et
il disait qu’aux choses que nous sommes obligés de faire on y doit tolérer
quelque négligence, mais que ce que nous faisons par vanité, c’est être ridicule
que de n’y être que médiocres. Les boiteux et les goutteux ne se peuvent
empêcher de marcher, mais il n’y a rien qui les oblige à danser la valse ou les
cinq pas. »
La comparaison que Racan donne à Malherbe, et que j’avais, de mon côté,
facilement aperçue, est immédiate. Je vais vous faire voir qu’elle est féconde.
Elle se développe très loin avec une curieuse précision. Elle est peut-être
quelque chose de plus qu’une similitude d’apparences.
La marche comme la prose a toujours un objet précis. Elle est un acte dirigé
vers quelque objet que notre but est de joindre. Ce sont des circonstances
actuelles, la nature de l’objet, le besoin que j’en ai, l’impulsion de mon
désir, l’état de mon corps, celui du terrain, qui ordonnent à la marche son
allure, lui prescrivent sa direction, sa vitesse, et son terme fini. Toutes les
propriétés de la marche se déduisent de ces conditions instantanées et qui se
combinent singulièrement dans chaque occasion, tellement qu’il n’y a pas deux
déplacements de cette espèce qui soient identiques, qu’il y a chaque fois
création spéciale, mais, chaque fois, abolie et comme absorbée dans l’acte
accompli.
La danse, c’est tout autre chose. Elle est, sans doute, un système d’actes, mais
qui ont leur fin en eux-mêmes. Elle ne va nulle part. Que si elle poursuit
quelque chose, ce n’est qu’un objet idéal, un état, une volupté, un fantôme de
fleur, ou quelque ravissement de soi-même, un extrême de vie, une cime, un point
suprême de l’être… Mais si différente qu’elle soit du mouvement utilitaire
notez cette remarque essentielle quoique infiniment simple, qu’elle use des
mêmes membres, des mêmes organes, os, muscles, nerfs, que la marche même.
Il en va exactement de même de la poésie qui use des mêmes mots, des mêmes
formes, des mêmes timbres que la prose.
La prose et la poésie se distinguent donc par la différence de certaines lois ou
conventions momentanées de mouvement et de fonctionnement appliquées à des
éléments et à des mécanismes identiques. C’est pourquoi il faut se garder de
raisonner de la poésie comme l’on fait de la prose. Ce qui est vrai de l’une n’a
plus de sens, dans bien des cas, si on veut le trouver dans l’autre. Et c’est
par quoi (pour choisir un exemple), il est facile de justifier immédiatement
l’usage des inversions ; car ces altérations de l’ordre coutumier et, en quelque
sorte, élémentaire des mots en français, furent critiquées à diverses époques,
très légèrement à mon sens, par des motifs qui se réduisent à cette formule
inacceptable : la poésie est prose.
Poussons un peu plus loin notre comparaison, qui supporte d’être approfondie. Un
homme marche. Il se meut d’un lieu à un autre, selon un chemin qui est toujours
un chemin de moindre action. Notons ici que la poésie serait impossible si elle
était astreinte au régime de la ligne droite. On vous enseigne : dites qu’il
pleut, si vous vou1ez dire qu’il pleut ! Mais jamais l’objet d’un poète n’est et
ne peut être de nous apprendre qu’il pleut. Il n’est pas besoin d’un poète pour
nous persuader de prendre notre parapluie. Voyez ce que devient Ronsard, ce que
devient Hugo, ce que deviennent le rythme, les images, les consonances, les plus
beaux vers du monde, si vous soumettez la poésie au système Dites qu’il pleut !
Ce n’est que par une confusion grossière des genres et des moments que l’on peut
reprocher au poète ses expressions indirectes et ses formes complexes. On ne
voit pas que la poésie implique une décision de changer la fonction du langage.
Je reviens à l’homme qui marche. Quand cet homme a accompli son mouvement, quand
il a atteint le lieu, le livre, le fruit, l’objet qu’il désirait, aussitôt cette
possession annule tout son acte, l’effet dévore la cause, la fin absorbe le
moyen, et quelles qu’aient été les modalités de son acte et de sa démarche, il
n’en demeure que le résultat. Le boiteux, le goutteux dont parlait Malherbe, une
fois qu’ils ont péniblement gagné le fauteuil où ils se dirigeaient, ne sont pas
moins assis que l’homme le plus alerte qui eût rejoint ce siège d’un pas vif et
léger. Il en est tout de même dans l’usage de la prose. Le langage dont je viens
de me servir, qui vient d’exprimer mon dessein, mon désir, mon commandement, mon
opinion, ma demande ou ma réponse, ce langage qui a rempli son office,
s’évanouit à peine arrivé. Je l’ai émis pour qu’il périsse, pour qu’il se
transforme irrévocablement en vous, et je connaîtrai que je fus compris à ce
fait remarquable que mon discours n’existe plus. Il est remplacé entièrement et
définitivement par son sens, ou du moins par un certain sens, c’est-à-dire par
des images, des impulsions, des réactions ou des actes de la personne à qui l’on
parle ; en somme, par une modification ou réorganisation intérieure de celle-ci.
Mais celui qui n’a pas compris, celui-là conserve et répète les mots.
L’expérience est aisée…
Vous voyez donc que la perfection de ce discours, dont l’unique destination est
la compréhension, consiste évidemment dans la facilité avec laquelle il se
transmue en tout autre chose, en non-langage. Si vous avez compris mes paroles,
mes paroles mêmes ne vous sont plus de rien ; elles ont disparu de vos esprits,
cependant que vous possédez leur contre-partie, vous possédez, sous forme
d’idées et de relations, de quoi restituer la signification de ces propos, sous
une forme qui peut être toute différente.
En d’autres termes, dans les emplois pratiques ou abstraits du langage qui est
spécifiquement prose, la forme ne se conserve pas, ne survit pas à la
compréhension, elle se dissout dans la clarté, elle a agi, elle a fait
comprendre, elle a vécu.
Mais au contraire, le poème ne meurt pas pour avoir servi ; il est fait
expressément pour renaître de ses cendres et redevenir indéfiniment ce qu’il
vient d’être.
La poésie se reconnaît à cet effet remarquable par quoi on pourrait bien la
définir : qu’elle tend à se reproduire dans sa forme, qu’elle provoque nos
esprits à la reconstituer telle quelle. Si je me permettais un mot tiré de la
technique industrielle, je dirais que la forme poétique se récupère
automatiquement.
C’est là une propriété admirable et caractéristique entre toutes. Je voudrais
vous en donner une image simple. Imaginez un pendule qui oscille entre deux
points symétriques. Associez à l’un de ces points l’idée de la forme poétique,
de la puissance du rythme, de la sonorité des syllabes, de l’action physique de
la déclamation, des surprises psychologiques élémentaires que vous causent les
rapprochements insolites des mots. Associez à l’autre point, au point conjugué
du premier, l’effet intellectuel, les visions et les sentiments qui constituent
pour vous le « fond », le « sens » du poème donné, et observez alors que le
mouvement de votre âme, ou de votre attention, lorsqu’elle est assujettie à la
poésie, toute soumise et docile aux impulsions successives du langage des dieux,
va du son vers le sens, du contenant vers le contenu, tout se passant d’abord
comme dans l’usage ordinaire du parler ; mais il arrive ensuite, à chaque vers,
que le pendule vivant soit ramené à son point de départ verbal et musical. Le
sens qui se propose trouve pour seule issue, pour seule forme, la forme même de
laquelle il procédait. Ainsi entre la forme et le fond, entre le son et le sens,
entre le poème et l’état de poésie, une oscillation se dessine, une symétrie,
une égalité de valeur et de pouvoirs.
Cet échange harmonique entre l’impression et l’expression est à mes yeux le
principe essentiel de la mécanique poétique, c’est-à-dire de la production de
l’état poétique par la parole. Le poète fait profession de trouver par bonheur
et de chercher par industrie ces formes singulières du langage dont j’ai essayé
de vous analyser l’action.
La poésie ainsi entendue est radicalement distincte de toute prose : en
particulier, elle s’oppose nettement à la description et à la narration
d’événements qui tendent à donner l’illusion de la réalité, c’est-à-dire au
roman et au conte quand leur objet est de donner puissance du vrai à des récits,
portraits, scènes et autres représentations de la vie réelle. Cette différence a
même des marques physiques qui s’observent aisément. Considérez les attitudes
comparées du lecteur de romans et du lecteur de poèmes. Il peut être le même
homme, mais qui diffère excessivement de soi-même quand il lit l’un ou l’autre
ouvrage. Voyez le lecteur de roman quand il se plonge dans la vie imaginaire que
lui intime sa lecture. Son corps n’existe plus. Il soutient son front de ses
deux mains. Il est, il se meut, il agit et pâtit dans l’esprit seul. Il est
absorbé par ce qu’il dévore ; il ne peut se retenir, car je ne sais quel démon
le presse d’avancer. Il veut la suite, et la fin, il est en proie à une sorte
d’aliénation : il prend parti, il triomphe, il s’attriste, il n’est plus lui-
même, il n’est plus qu’un cerveau séparé de ses forces extérieures, c’est-à-dire
livré à ses images, traversant une sorte de crise de crédulité.
Tout autre est le lecteur de poèmes.
Si la poésie agit véritablement sur quelqu’un, ce n’est point en le divisant
dans sa nature, en lui communiquant les illusions d’une vie feinte et purement
mentale. Elle ne lui impose pas une fausse réalité qui exige la docilité de
l’âme, et donc l’abstention du corps. La poésie doit s’étendre à tout l’être ;
elle excite son organisation musculaire par les rythmes, délivre ou déchaîne ses
facultés verbales dont elle exalte le jeu total, elle l’ordonne en profondeur,
car elle vise à provoquer ou à reproduire l’unité et l’harmonie de la personne
vivante, unité extraordinaire, qui se manifeste quand l’homme est possédé par un
sentiment intense qui ne laisse aucune de ses puissances à l’écart.
En somme, entre l’action du poème et celle du récit ordinaire, la différence est
d’ordre physiologique. Le poème se déploie dans un domaine plus riche de nos
fonctions de mouvement, il exige de nous une participation qui est plus proche
de l’action complète, cependant que le conte et le roman nous transforment
plutôt en sujets du rêve et de notre faculté d’être hallucinés.
Mais je répète que des degrés, des formes de passage innombrables existent entre
ces termes extrêmes de l’expression littéraire.
Ayant tenté de définir le domaine de la poésie, je devrais à présent m’essayer à
envisager l’opération même du poète, les problèmes de la composition et de la
facture. Mais ce serait entrer dans une voie bien épineuse. On y trouve des
tourments infinis, des disputes qui ne peuvent avoir de fin, des épreuves, des
énigmes, des soucis et même des désespoirs qui font le métier de poète un des
plus incertains et des plus fatigants qui soient. Le même Malherbe que j’ai déjà
cité, disait qu’après avoir achevé un bon sonnet, l’auteur a droit de prendre
dix ans de repos. Encore admettait-il par là que ces mots : un sonnet achevé
signifient quelque chose… Quant à moi, je ne les entends guère… Je les
traduis par sonnet abandonné.
Effleurons cependant cette difficile question : Faire des vers…
Mais vous savez tous qu’il existe un moyen fort simple de faire des vers.
Il suffit d’être inspiré, et les choses vont toutes seules. Je voudrais bien
qu’il en fût ainsi. La vie serait supportable. Accueillons, toutefois, cette
réponse naïve, mais examinons-en les conséquences.
Celui qui s’en contente, il lui faut consentir ou bien que la production
poétique est un pur effet du hasard, ou bien qu’elle procède d’une sorte de
communication surnaturelle ; l’une et l’autre hypothèse réduisent le poète à un
rôle misérablement passif. Elles font de lui ou une sorte d’urne en laquelle des
millions de billes sont agitées, ou une table parlante dans laquelle un esprit
se loge. Table ou cuvette, en somme, mais point un dieu, – le contraire d’un
dieu, le contraire d’un Moi.
Et le malheureux auteur, qui n’est donc plus auteur, mais signataire, et
responsable comme un gérant de journal, le voici contraint de se dire :« Dans
tes ouvrages, cher poète, ce qui est bon n’est pas de toi, ce qui est mauvais
t’appartient sans conteste. »
Il est étrange que plus d’un poète se soit contenté, – à moins qu’il ne se soit
enorgueilli, – de n’être qu’un instrument, un médium momentané.
Or, l’expérience comme la réflexion nous montrent, au contraire, que les poèmes
dont la perfection complexe et l’heureux développement imposeraient le plus
fortement à leurs lecteurs émerveillés l’idée de miracle, de coup de fortune,
d’accomplissement surhumain (à cause d’un assemblage extraordinaire des vertus
que l’on peut désirer mais non espérer trouver réunies dans un ouvrage), sont
aussi des chefs-d’oeuvre de labeur, sont, d’autre part, des monuments
d’intelligence et de travail soutenu, des produits de la volonté et de
l’analyse, exigeant des qualités trop multiples pour pouvoir se réduire à celles
d’un appareil enregistreur d’enthousiasmes ou d’extases. On sent bien devant un
beau poème de quelque longueur, qu’il y a des chances infimes pour qu’un homme
ait pu improviser sans retours, sans autre fatigue que celle d’écrire ou
d’émettre ce qui lui vient à l’esprit, un discours singulièrement sûr de soi,
pourvu de ressources continuelles, d’une harmonie constante et d’idées toujours
heureuses, un discours qui ne cesse de charmer, où ne se trouvent point
d’accidents, de marques de faiblesse et d’impuissance, où manquent ces fâcheux
incidents qui rompent l’enchantement et ruinent l’univers poétique dont je vous
parlais tout à l’heure.
Ce n’est pas qu’il ne faille, pour faire un poète, quelque chose d’autre,
quelque vertu qui ne se décompose pas, qui ne s’analyse pas en actes
définissables et en heures de travail. Le Pégase-Vapeur, le Pégase-Heure ne sont
pas encore des unités légales de puissance poétique.
Il y a une qualité spéciale, une sorte d’énergie individuelle propre au poète.
Elle paraît en lui et le révèle à soi-même dans certains instants d’un prix
infini.
Mais ce ne sont que des instants, et cette énergie supérieure (c’est-à-dire
telle que toutes les autres énergies de l’homme ne la peuvent composer et
remplacer), n’existe ou ne peut agir que par brèves et fortuites manifestations.
Il faut ajouter, – ceci est assez important, – que les trésors qu’elle illumine
aux yeux de notre esprit, les idées ou les formes qu’elle nous produit à nous-
mêmes sont fort éloignés d’avoir une valeur égale aux regards étrangers.
Ces moments d’un prix infini, ces instants qui donnent une sorte de dignité
universelle aux relations et aux intuitions qu’ils engendrent sont non moins
féconds en valeurs illusoires ou incommunicables. Ce qui vaut pour nous seuls ne
vaut rien. C’est la loi de la Littérature. Ces états sublimes sont en vérité des
absences dans lesquelles se rencontrent des merveilles naturelles qui ne se
trouvent que là, mais ces merveilles toujours sont impures, je veux dire mêlées
de choses viles ou vaines, insignifiantes ou incapables de résister à la lumière
extérieure, ou encore impossibles à retenir, à conserver. Dans l’éclat de
l’exaltation, tout ce qui brille n’est pas or.
En somme, certains instants nous trahissent des profondeurs où le meilleur de
nous-mêmes réside, mais en parcelles engagées dans une matière informe, en
fragments de figure bizarre ou grossière. Il faut donc séparer de la masse ces
éléments de métal noble et s’inquiéter de les fondre ensemble et d’en façonner
quelque joyau.
Si l’on se plaisait à développer en rigueur la doctrine de la pure inspiration,
on en déduirait des conséquences bien étranges. On trouverait nécessairement,
par exemple, que ce poète qui se borne à transmettre ce qu’il reçoit, à livrer à
des inconnus ce qu’il tient de l’inconnu, n’a donc nul besoin de comprendre ce
qu’il écrit sous la dictée mystérieuse.
Il n’agit pas sur ce poème dont il n’est pas la source. Il peut être tout
étranger à ce qui découle au travers de lui. Cette conséquence inévitable me
fait songer à ce qui, jadis, était généralement cru au sujet de la possession
diabolique. On lit dans les documents d’autrefois qui relatent les
interrogatoires en matière de sorcellerie, que des personnes, souvent, furent
convaincues d’être habitées du démon, et condamnées de ce chef, pour avoir,
quoique ignorantes et incultes, discuté, argumenté, blasphémé pendant leurs
crises, en grec, en latin, voire en hébreu devant les enquêteurs horrifiés. (Ce
n’était point du latin sans larmes, je pense.)
Est-ce là ce que l’on exige du poète ? Certes, une émotion caractérisée par la
puissance expressive spontanée qu’elle déchaîne est l’essence de la poésie. Mais
la tâche du poète ne peut consister à se contenter de la subir. Ces expressions,
jaillies de l’émoi, ne sont qu’accidentellement pures, elles emportent avec
elles bien des scories, contiennent quantité de défauts dont l’effet serait de
troubler le développement poétique et d’interrompre la résonance prolongée qu’il
s’agit enfin de provoquer dans une âme étrangère. Car le désir du poète, si le
poète vise au plus haut de son art, ne peut être que d’introduire quelque âme
étrangère à la divine durée sa vie harmonique, pendant laquelle se composent et
se mesurent toutes les formes et durant laquelle s’échangent les répons de
toutes ses puissances sensitives et rythmiques.
L’inspiration, mais c’est au lecteur qu’elle appartient et qu’elle est destinée,
comme il appartient au poète d’y faire penser, d’y faire croire, de faire ce
qu’il faut pour qu’on ne puisse attribuer qu’aux dieux un ouvrage trop parfait,
ou trop émouvant pour sortir des mains incertaines d’un homme. L’objet même de
l’art et le principe de ses artifices, il est précisément de communiquer
l’impression d’un état idéal dans lequel l’homme qui l’obtiendrait serait
capable de produire spontanément, sans effort, sans faiblesse, une expression
magnifique et merveilleusement ordonnée de sa nature et de nos destins.
Paul Valéry poésie
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Terwijl de stoet het plein in de breedte overschreed en door de hoofddeur de kerk binnentrok, bleven de oude mannen in de caféhof achter en stootten kruipend tafel en stoelen om. Telkens als er een glas in scherven viel, hadden ze de grootste lol. De kerk slokte de stoet op. De deur werd gesloten, diegenen buiten latend die daar nog waren en die geen betekenis hechtten aan God. Kaffa onder de meidoorn. De vier kaarters die zo dronken waren dat ze beslist niet voor de Almachtige zouden mogen verschijnen ook al stonden ze met één been in het graf.
Opoe Ramesz, die al sinds jaren niet meer in de kerk was geweest, waar ze toch de godganselijke dag tegen aan zat te kijken, gewoon omdat ze nooit verder kwam dan haar stoel. En Jacob, die zijn hele leven te liederlijk was geweest, nooit een kerk vanbinnen had gezien en nu haast van honger door zijn knieën zakte. En het bed stond er nog. Leeg. De kist werd op het koor geplaatst. Klein stond de jongen daar, tussen kaarsen. Zijn gezicht begon al als was te verkleuren. Pastoor Joachim Andrade bewoog zich in een wolk van wierook die door de hele kerk trok en nog feller geurde dan daarbuiten omdat de ramen en deuren gesloten bleven. De lucht trok zo diep in de neus van de kleine Irma Azurri dat ze moest hoesten en tranen in haar ogen kreeg. Het gebeuren op het koor speelde zich af volgens een vast ritueel, waarvan het opgebaarde lichaam het middelpunt was. De gelovigen volgden de handelingen van de pastoor nauwelijks omdat ze meer oog hadden voor de dode jongen. Want ze waren er nog niet zeker van dat hij echt dood zou blijven. Tot hij werkelijk onder de grond zou liggen, konden ze de gekste dingen van hem verwachten. Dat waren ze van hem gewend. Ook de her en der geplaatste heiligen monsterden de jongen. Ze schatten diens deugdzame kwaliteiten, leken daar niet hoog van op te geven, want er veranderde niets in de harde uitdrukking op hun gezichten.
De pastoor bad luid, knielend voor de kist waarin de jongen rustig leek te slapen. Zonder te beseffen dat hij al in de vergetelheid was. Alsof hij alles over zich heen liet gaan met hetzelfde geduld dat hij bij leven had opgebracht om zijn beesten te temmen. Alle heiligen uit de hemel werden aangeroepen. Hun werd gesmeekt de ziel van de jongen bij te staan op zijn tocht naar de poort van het paradijs, waarvan verteld werd dat die zo moeilijk te openen was. Ook de gelukzalige kluizenaar werd aangeroepen om zijn kleine dorpsgenoot te verwelkomen. Wat was die hemel eigenlijk? vroegen de dorpelingen zich af. Was het een tuin vol lusten? Konden de mensen zich daar eindelijk uitleven? Zouden ze daar de dingen kunnen doen die op aarde verboden waren maar die hen toch in het bloed zaten? Zuipen? Of waren ze daar, zoals de pastoor het in zijn gebeden aanhaalde, gelukkig in het aanschouwen en beminnen van God? Was God een mooie hoer die daar voor iedereen in haar hemel te grijp lag? Een mooie meneer die altijd goed weer speelde?
Ton van Reen: Landverbeuren (63)
wordt vervolgd
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Laure
(Colette Peignot 1903 – 1938))
Je l’ai vue
Je l’ai vue – cette fois je l’ai vue
où ? à la limite de l’aube
et de la nuit
l’aube du jardin
la nuit de la chambre
avec un sourire qui craque
une patience d’ange
elle m’attend
Et je le sais bien
Puis d’une voix lointaine
elle m’a dit
Ah mais non
Tu ne deviendras pas folle
Entends-tu, tu ne te conduiras pas comme cela,
Tu feras ceci et cela. Elle parlait parlait sans que je ne
comprenne plus rien
Je la suivais malgré moi
Dans un froufrou de soie une robe à traîne avec beaucoup de
volants qui rebondissaient sur chaque marche.
elle a disparu
brillante bruissante
par un escalier étroit
et délabré
En haut
c’était le rayon d’hommes, des milliers de vêtements
Une pièce toujours fermée, surchauffée
Seule présente vivante :
elle
elle parcourait les espaces vides entre les mannequins
portant tous son masque
Laure poetry
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100 Jahre Cabaret Voltaire Jubiläum
Das Cabaret Voltaire begeht den hundertsten Geburtstag von Dada und dem Cabaret Voltaire mit 165 Feiertagen: Einen für jede und jeden der 165 DadaistInnen, die bereits in der Dauerausstellung «Dada in Nuce» portraitiert wurden. 2016 fokussiert sich das Cabaret Voltaire wieder verstärkt auf die Zusammenarbeit mit zeitgenössischen KünstlerInnen, welche sich mit Dada auseinandersetzen. Mit täglich stattfindenden Soiréen will das Cabaret Voltaire in einer masslos überfordernden Bespielung bis zum Irrsinn, bis zur Bewusstlosigkeit einen künstlerischen Ort schaffen, in dem das Ereignis im Vordergrund steht.
Am 5. Februar 2016 wird das Cabaret Voltaire hundert Jahre alt. Als Geburtsort von Dada wollen wir dieses Ereignis von Februar bis Juli – der historisch-mythischen Entstehungszeit von Dada – exzessiv feiern. Denn hier, an der Spiegelgasse 1 in Zürich, wurde 1916 am Abend des 5. Februar im Saal der «Meierei» die «Künstlerkneipe Voltaire», welche später in «Cabaret Voltaire» umbenannt wurde, der erste Dada Abend ausgetragen. Tristan Tzara, Marcel Janco, Hans Arp, Sophie Taeuber-Arp, Hugo Ball, Emmy Hennings und Richard Huelsenbeck gehörten zu den Begründern. Der 5. Februar wird offiziell als Geburtstag von Dada gefeiert, obschon erst am 18. April 1916 die Bezeichnung «Dada» gefunden wurde. Das Cabaret Voltaire selbst war bis zum 23. Juni 1916 in Betrieb, als Hugo Ball im kubistischen Kostüm als magischer Bischof auftrat. Danach fand am 14. Juli 1916 im Zunfthaus zur Waag die erste Dada Soirée mit dem Vortrag des Eröffnungs-Manifests von Hugo Ball statt. Diesen Zeitraum bis zur Abreise von Hugo Ball und Emmy Hennings ins Tessin um den 18. Juli 1916 kann man als die mythische Entstehungszeit von Dada betrachten. Ein Jahr später wurde Dada in der «Galerie Dada» als Kunstbewegung berühmt und weltweit verbreitet.
Die 165 Feiertage zum hundertsten Geburtstag werden zu einer Legende, zu einer Gladiatorengeste, ähnlich derjenigen des ursprünglichen Cabaret Voltaire, zur Wiederaufführung einer Legende und zum Ausleben einer Obsession. Der «Obsession Dada» geht das Cabaret Voltaire auch in einer gleichnamigen Sonderausstellung (Eröffnung 5. Februar 2016) auf den Grund. Der Schweizer Kurator Harald Szeemann (1933–2005) hat sich mit Obsession der Kunst und dem Ausstellungsmachen verschrieben. Viele seiner Ausstellungen widmeten sich explizit Dada oder den Dada-Erben. Gemeinsam mit der Künstlerin Una Szeemann will das Cabaret Voltaire dieser Obsession im Archiv von Harald Szeemann im Getty Research Center in Los Angeles nachgehen und in Zusammenarbeit mit dem Getty Research Center eine Ausstellung samt Publikation entwickeln. Ein weiterer zeitgenössischer Künstler, welcher im Jubiläumsjahr im Cabaret Voltaire die erste «Soirée des Cubismo Ideologico» organisieren wird, ist der mexikanische Künstler Carlos Amorales, der Begründer der avantgardistischen Bewegung «Cubismo Ideologico». Er spürt in Lateinamerika dem Stern nach, welchen Marcel Duchamp sich einrasiert hat. Die schwedischen Künstler Carl Michael Hausswolff und Leif Elggren, Begründer der «Königreiche von Elgaland-Vargaland» (KREV), deren Territorium aus allen Grenzen und dem «Dazwischen» besteht, organisieren 2016 ein Gipfeltreffen, im Zuge dessen die Schweiz als Grenze von den Königreichen von Elgaland-Vargaland annektiert wird und somit alle Innen- und Aussengrenzen der Schweiz aufgehoben werden. Die Schweiz als «Vogelkäfig umgeben von brüllenden Löwen», wie Hugo Ball 1916 sagte, wird zur internationalen Grenze, einer neutralen Zone oder einem Kondomminium aller Staaten der Welt.
Dada Jubiläum im Cabaret Voltaire 5. Februar–18. Juli 2016
Cabaret Voltaire
Spiegelgasse 1 Dada-fotografie project ‘Hoe bluf ik mijn weg door fotografie?’
8001 Zürich
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Theo van Doesburg and others.
DADA in Tilburg: www.antonykok.nl
(also: www.fleursdumal.nl & www.jefvankempen.nl)
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Amalgaam is een duobundel van twee dichters, Willy Martin en Carina van der Walt. Martin was in een vorig leven een avontuurlijke hoogleraar lexicologie die zich vooral richtte op nieuwe technologie en systematiek om taal te kunnen voorzien van het juiste frame. Van der Walt begon in het reguliere onderwijs als docente Afrikaans, Nederlands en Setswana en legde zich later toe op het academisch onderzoek naar kinder- en jeugdliteratuur. In het grootste deel van de bundel worden Zuid-Afrikaans en Nederlands afgewisseld, waarbij ieder zijn eigen moedertaal voor zijn rekening neemt: Martin het Nederlands (en Vlaams), Van der Walt het Afrikaans.
De bundel heet Amalgaam, en dat woord wordt – zoals het een uitgave van een lexicograaf betaamt – netjes in een voetnoot toegelicht. In de figuurlijke zin betekent ‘amalgaam’ in zowel het Afrikaans als in het Nederlands hetzelfde: een mengsel, mengelmoes. Die beschrijving is behoorlijk van toepassing op dit gezamenlijke werk: het gaat om twee verschillende dichters uit verschillende generaties die niet alleen duidelijk hun eigen thematiek en stijl hebben, maar die ook nog eens in een aparte taal schrijven. Het probleem daarbij is wel dat die talen ‘valse vrienden’ zijn – ze hebben een gezamenlijk verleden, maar de schijnbare overlap bestaat voor een deel uit goed afgedekte valkuilen. Al in het voorwoord wordt de wordingsgeschiedenis vanuit het Groot Woordenboek Afrikaans en Nederlands (de culminatie van Martin’s werk als hoogleraar) uit de doeken gedaan, en daarmee is al meteen duidelijk dat de lezer het nodige te wachten staat.
De normale lezer moge het op dit moment misschien duizelen, maar het valt wel mee. Amalgaam is een eerste voorzichtig experiment, en blijft volledig in het nette. Het is geen verraderlijke of dubbelzinnige smeltkroes geworden van talen en dichters, die de lezer de hele tijd op het verkeerde been zet – dat hebben de dichters overgelaten voor een volgend deel. De bundel is in zijn huidige vorm een gedegen bloemlezing waarin gedichten op elkaar gestapeld zijn die samen een mooi beeld geven van twee nogal verschillende dichters. Twee voor de prijs van een, zogezegd. Beiden hebben een prettige stijl die de ander niet in de weg zit. Martin is wat serieuzer en plechtstatiger, en Van der Walt wat levendiger en politieker – bijvoorbeeld over de betekenis van Lampedusa voor het zelfbeeld van Europa. Met name de gedichten van Van der Walt geven de indruk dat ze geschreven zijn voor een bezielende voordracht.
De bundel bevat naast oorspronkelijke gedichten ook een aantal vertalingen van gedichten van anderen, van uiteenlopende dichters zoals Paul van Ostaijen, Adam Small, Tsjebbe Hettinga, Hans du Plessis en Peter Snyders. Die buitenboordmotor had de bundel niet nodig: met name in hun eigen woorden is het eigen geluid al duidelijk genoeg te horen.
Vraag is natuurlijk hoe het vervolg van dit experiment eruit zal zien. Het is duidelijk dat er nog veel meer potentiële poëtische energie zit in het grensgebied tussen de twee zustertalen en tussen andere verwante talen. Door hun unieke professionele en persoonlijke achtergrond zijn Van der Walt en Martin ideale mentale experimentele opstellingen om als woordjesversneller tussen deze talen te fungeren. Het samenwerkingsproces zal om de energiedichtheid omhoog te krijgen waarschijnlijk nog intensiever moeten zijn. Door de dichters niet enkel per heel gedicht om en om te laten werken in of de ene taal of de andere, maar per regel aan zet te laten – of zelfs nog vaker, desnoods per woord of zelfs lettergreep, en in een taal naar keuze – kunnen de talen tegen elkaar in gaan draaien en met zeer hoge snelheid tegen elkaar aanbotsen. Het gedroomde resultaat is dan niet meer te duiden als het een of het ander, maar zou in het ideale geval leiden tot een spannende fusie van kernen uit beide talen en culturen. Dat is misschien minder toegankelijk dan Amalgaam – hoe intensiever de opeenstapeling van frames uit beide talen, hoe dieper de benodigde kennis – maar zelfs als dat benodigde dubbele taalgevoel maar voor een zeer klein deel van de mensheid zal zijn weggelegd, is er voor de rest vast al veel plezier te beleven door het spectaculaire uiteenspatten van elementaire talige deeltjes. Amalgaam is de eerste speelse stap op een veelbelovende pad, en hopelijk zetten Van der Walt en Martin aangemoedigd door het succes van hun geslaagde dubbelbundel door met dit experiment – alleen of met hulp van anderen.
Michiel Leenaars
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Willy Martin & Carina van der Walt
Amalgaam
Prijs € 15,-
95 pag.
ISBN 978 90 8684 117 2
Uitgeverij IJzer
Postbus 628
3500 AP Utrecht
Tel: 030 – 2521798
http://www.uitgeverij-ijzer.nl/
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De Poëzieweek 2016
is van donderdag 28 januari t/m woensdag 3 februari
In heel Nederland en Vlaanderen zetten liefhebbers tijdens Poëzieweek de poëzie in het zonnetje. Een feest dat wordt gevierd met vele activiteiten, bundelpublicaties, prijsuitreikingen en poëzieoptredens van groot tot klein. Vele Nederlandse en Vlaamse organisaties van poëzie-evenementen bundelen daartoe hun krachten en roepen het grote publiek op ook zelf actief met poëzie aan de slag te gaan. Open de vergadering met een gedicht, krijt ze op de stoep, hang iets in de etalage, geef ze mee aan je klanten. voor de vierde Poëzieweek. De Poëzieweek 2016 heeft het motto ‘Jaren die druppelend versmelten’. Het Poëziegeschenk 2016, getiteld ‘Neem en lees’, is geschreven door Stefan Hertmans.
Poëzieweek 2016: ‘Jaren die druppelend versmelten’
Onder het motto ‘Jaren die druppelend versmelten’ staat de Poëzieweek in 2016 in het thema van ‘herinneringen’. Wie wordt er niet lyrisch als het gaat om mooie jeugd-, of vakantieherinneringen? Evengoed zijn we bij momenten ontroerd door ons verleden, zowel collectief als individueel. We herinneren ons onze eerste kus, maar ook wanneer de Twin Towers ingestort zijn. Herinneringen voeren ons terug naar een ver of nabij verleden, maar leiden ze ons soms ook niet om de tuin? Herinneringen kunnen ons op een roze wolk parkeren, maar kunnen ons evenzeer laten verdwalen in de minder aangename momenten van ons verleden. Poëzie is het genre bij uitstek om het verleden in woorden om te zetten, te bezingen, te bekritiseren, kortom, te herinneren. Sinds mensenheugenis roepen diverse dichters het thema van de herinnering aan om het eigen verleden, verloren dierbaren of maatschappelijke gebeurtenissen tot leven te wekken.
Poëziegeschenk ‘Neem en lees’
In ‘Neem en lees’ neemt Stefan Hertmans de lezer mee langs allerlei vormen van herinnering. Zich iets herinneren is voor Hertmans niet alleen privé, het heeft ook te maken met de beelden waarvan een samenleving leeft: gebeurtenissen, kunstwerken, boeken. In deze gloedvolle gedichten wisselen intieme en maatschappelijke herinneringen elkaar dan ook af – van de eerste verliefde blik tot aan gedachten die een bootvluchteling zouden kunnen overvallen. Het Poëziegeschenk wordt tijdens de Poëzieweek door boekwinkels aan klanten cadeau gedaan bij aankoop van € 12,50 of meer aan poëziebundels.
Poëzieprijzen
De VSB Poëzieprijs is ieder jaar dé prijs voor Nederlandstalige poëzie en bekroont de beste dichtbundel in het Nederlands met een bedrag van € 25.000,-.Vlaamse dichters maken ook nog eens kans op de Herman de Coninckprijzen, voor de beste bundel van een Vlaamse dichter. De uitreiking van de € 6.000,- grote prijs vindt al op 26 januari plaats in Antwerpen. Op de slotavond van Poëzieweek 2016 wordt in Amsterdam de winnaar van de Turing Gedichtenwedstrijd bekend gemaakt. De prijs voor het beste, anoniem ingezonden gedicht bedraagt € 10.000,-. Tot slot bekroont ook de Awater Poëzieprijs de beste bundel van het jaar, naar het oordeel van een jury bestaande uit professionele lezers en poëzierecensenten.
De dichters die kans maken op de VSB Poëzieprijs presenteren hun genomineerde bundels voorafgaand aan de uitreiking op verschillende Vlaamse en Nederlandse podia, o.a. in Rotterdam, Gent, Den Haag, Antwerpen, Arnhem, Utrecht en Amsterdam. Kijk voor alle data en locaties op www.vsbpoezieprijs.nl.
Nederlandse Kampioenschap Poetry Slam
Naast de prijzen voor de beste bundels en gedichten organiseert Literatuurhuis in Utrecht het NK Poetry Slam. Wie brengt zijn poëzie het beste over het voetlicht volgens jury en publiek. De finale van het NK Poetry Slam vindt plaats op vrijdag 29 januari in Tivoli-Vredenburg. Stefan Hertmans treedt er op als jurylid. De halve finalestrijd om de felbegeerde plekken in de eindronde staat woensdag 13 januari gepland.
Hallo Gedicht! Dichter des Vaderlands geeft poëzie-lees-les
Dichter des Vaderlands Anne Vegter neemt de handschoen op en daagt alle lezers van Nederland uit om niet langer bang te zijn voor poëzie. Gedichten willen gelezen worden, de Dichter des Vaderlands biedt daarbij de helpende hand. Weg met die angst voor het niet-begrijpen, weg met het idee ‘dat is niks voor mij’! Samen met de dichters Vrouwkje Tuinman, Ellen Deckwitz, Charles Ducal, Maarten van der Graaff, Tsead Bruinja en Maud Vanhauwaert trekt Vegter vanaf de Poëzieweek van provincie naar provincie met een verhelderende masterclass “Poëzie lezen” voor iedereen die nog met een boog om de poëzie heenloopt.
Tijdens de Poëzieweek is Hallo Gedicht! te zien in Groningen (28 januari), Rotterdam (30 januari) en Arnhem (2 februari). Kijk hier voor alle optredens tot en met half mei.
Poëzielessen, Boek-Een-Dichter
Voor het basis- en voortgezet onderwijs stellen Stichting Lezen en Stichting Lezen Vlaanderen jaarlijks nieuwe poëzielessen beschikbaar zodat leerkrachten tijdens Poëzieweek eenvoudig met gedichten in de klas aan de slag kunnen. De poëzielessen bestaan uit gedichten die nauw aansluiten op het thema ‘herinnering’. De Poëzielessen bij de Poëzieweek 2016 zijn te vinden op Poëzieweek.com. Daar vinden leerkrachten en docenten ook eerdere edities van de Poëzielessen.
Een andere manier om op school met poëzie te werken is door een dichter in de klas uit te nodigen. In januari en tijdens poëzieweek kan dat extra voordelig, door een subsidie van het Nederlands Letterenfonds. Kijk snel welke dichter bij jou in de klas gedichten voor kan komen lezen!
Activiteitenoverzicht
Alles wat met Poëzieweek te maken heeft en heel veel suggesties en tips vind je op Poezieweek.com en Facebook. En organiseer je zelf een activiteit, meld hem aan en nodig iedereen uit!
# Zie de website http://www.poezieweek.com/
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Hendrik Nicolaas Werkman
(1882-1945)
Gestadige beweging
printa printo
cito typo
composita
colorita
sano corpo
bene torbo
bras de more
ras te vore
vaste code
baste mode
tanto tempo
desto presto
ante poco
sito foco
ador amo
para diso
sin peccato
nil dacapo
bene vista
male jacta
poke d’ore
pido lore
paso retro
volte metro
Hendrik Nicolaas Werkman poetry
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Laure
(Colette Peignot 1903 – 1938)
Le Corbeau
C’était dans la forêt
le silence et le secret
d’une étoile à multiples rayons.
Loin, à l’orée du bois
dans cette allée
que des arbres bas
couvrent en arceau
un enfant passa
perdu
effrayé, émerveillé de me voir
comme je l’apercevais lui-même
tout enchâssé dans une sphère à flocons de neige.
Les tourbillons nous rapprochaient
comme pour se jouer de lui et de moi.
Un soleil violet, hors d’usage
et des lueurs d’orage
nous glaçaient d’épouvante.
Les fées et les ogres se disputant décidément
notre commune angoisse
voulurent que la foudre déchirât
non loin de là
un grand arbre
qui s’ouvrit
comme un ventre.
Je bramai.
L’enfant, jambes nues zébrées de froid et capuchon
bien réel (à tordre)
rouvrit les yeux.
A ma vue, il s’enfuit.
Renonçant à le poursuivre
ramassant dans l’ornière un étrange destin
somme toute fort logique
je rebroussai mon chemin
« comme si de rien n’était »
mais je sentais à mon épaule
ce frôlement lourd et discret
de l’oiseau aux ailes noires
et le considérant avec douceur
j’eusse voulût que partout il m’accompagnât et
toujours me précédât
comme un chevalier son héraut.
De plus en plus perdue
heurtant les pierres
glissant sur les feuilles mortes
m’enlisant dans la vase d’un étang
j’arrivai à une maison abandonnée
un puits de mousse et vert de gris
un seuil défoncé
j’entrai.
Le papier à fleurs et moisi
ondulait par vagues
vers un plancher pourri
une cheminée béante
exhibait les traces encore intactes d’un feu éteint
cendres, tibias calcinés de frênes et de bouleaux.
Je poussais des portes sans gonds
dont la chute me terrifiait
j’ouvrais des fenêtres sans carreaux
comme si l’air me manquait.
Enfin, je montai un escalier dérisoire.
Les murs, couverts de graffitis étranges, inconnus
jamais vu
mettaient ma vie à nue
avec mon nom en toutes lettres mêlé à des crimes :
« et de quel droit ?
du droit des pauvres ».
Dans ce grenier souillé
l’oiseau me rejoignit
de son cri
pour fouailler les vivants
de son bec
pour dépecer les morts
l’ombre noire projetée sur moi
semblait élire une proie
La nuit ma trouvée
étranglée au fond du bois
Elle m’a enveloppée d’un halo de lune
et bercée dans la brume
une brume blanche, mouvante et givrée :
« je connais ton étoile
va et suis-la
Cet être sans nom
renié tour à tour
par la nuit et le jour
ne peut rien contre toi
et ne te ressemble pas
crois-moi
Lorsque demain à l’aube
ta tête sera jetée
au panier des guillotinés
souviens-toi
Assassin
Que toi seul
as bu à mon sein
« tout le lait de la tendresse humaine »
Laure (janvier 1936) poetry
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Het volk zou woedend op hem zijn omdat hij hen weer eens te grazen had genomen. Daarna zou men zich net zo weinig goeds van hem herinneren als voorheen. Maar de jongen bleef dood. Van moment op moment werd hij kouder en stijver. Vanuit zijn open kist zag hij niet hoe de gevels van de huizen aan hem voorbij gleden. Niet hoe de buizerd onrustig rond de top van de meidoorn vloog. Hoorde niets van het luide voorbidden van pastoor Joachim Andrade, die met het kruis voor de stoet uit liep. Niets van het bidden van de anderen, tussen wier stemmen die van de kraaien duidelijk te herkennen vielen. Niets van het gerochel van opoe Ramesz toen de stoet haar passeerde, terwijl zij al dat volk tegen de meidoorn omhoog zag lopen, op het kerkdak zag balanceren of ondersteboven aan haar voorbij zag gaan. Nee, niets rook de jongen van de geur van wierook die zo scherp was dat hij zelfs de lucht van het loofvuur verdrong.
Hij bleef stil liggen in zijn kist, stijf en kil. Reageerde niet meer op het snikken van Céleste toen de stoet de kroeg passeerde. De cafémeid liet haar tranen de vrije loop en vluchtte naar het achterhuis. Waar de kastelein bij zijn koffiepot zat en haar meewarig aanstaarde, alsof hij wilde weten of ze wel in staat was om de komende avond de kroeg open te houden. De vier oude mannen, die weer in de caféhof zaten te kaarten, liepen niet mee met de stoet omdat ze niet meer al te best ter been waren. Bovendien waren ze te oud en vooral veel te dronken. Maar ze kenden hun christelijke plichten wel, legden hun kaarten aan de kant en zakten op hun knieën voor de processie. Dat werd verwacht van iedereen die niet meeliep. Zo hoorde men te knielen voor een dode die een goddelijke tik had meegekregen voor de korte tijd dat hij nog boven aarde stond, totdat hij aan de pieren zou worden overgeleverd. Alleen goddelijk vanaf het moment dat hij de geest had gegeven tot aan het tijdstip dat de eerste aardkluiten op zijn kist zouden roffelen. Vol verbazing zagen de oudjes tussen de meelopers in de stoet de slager. Met opgelegde vriendelijkheid had Azurri de timmerman bij de kraag, zo de man dwingend mee te lopen. Blijkbaar had de timmerman geprobeerd onder de plichten van zijn vaderschap uit te komen. De rouwdienst voor zijn jongen liet hem koud. Maar de hand van de slager hield hem dicht bij de kist en ver van de jenever. Van het knielen brachten de vier kaarters niet veel terecht. Ze zaten op handen en voeten op de grond, omdat tafel en stoelen wankel waren en te weinig houvast boden. Toen ze elkaar in deze vreemde houding zagen, barstten ze in lachen uit en riepen `boe boe’ naar de stoet. Allen die meeliepen, zagen met afgrijzen dat de vier oude mannen tegen elkaar blaften en als honden rond de tafel kropen.
Ton van Reen: Landverbeuren (62)
wordt vervolgd
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AMALGAAM programma in De Poorten, Tilburg
op 2 februari 2016 in wijkcentrum De Poorten, Tilburg om 20:00 in het kader van Week van de Poëzie 2016 met het THEMA HERINNERING met bekende en nieuwe stemmen van Tilburgse dichters
1. Jef van Kempen leest eigen gedichten en een gedicht van Henry Dolmans uit 1898 ter gelegenheid van de inwijding van de splinternieuwe kerk OLV van de Rozenkrans (Hasselt / De Poorten).
2. Cees van Raak licht de geschiedenis toe van het huidige wijkcentrum De Poorten. Zijn historisch perspectief is gepubliceerd in Van Godshuis tot De Poorten: Geschiedenis van de Hasseltse kerk (2005).
3. Jasper Mikkers leest drie ongepubliceerde gedichten uit zijn kindertijd met het kopje “de God van het kind” als tegenpool met de devotie en negentiende eeuw se taalgebruik van Henri Dolmans.
Nieuwe dichterstemmen uit Tilburg en Leuven
4. Carina van der Walt (woonachtig in Tilburg, maar geboren in ZA)
en Willy Martin (een professionele jet setter onder de Vlaamse academici)
Zij schrijven naar elkaar toe en uit elkaar uit in de tweetalige dichtbundel AMALGAAM.
Het programma wordt onderbouwd door digitale projecties van teksten en beelden.
Bundels:
Carina van der Walt en Willy Martin: AMALGAAM
Jasper Mikkers: De Gespiegelde Stad, gedichten
Cees van Raak: Van Godshuis tot De Poorten. Geschiedenis van de Hasseltse kerk
Jef van Kempen: Laatste Bedrijf, gedichten
Jef van Kempen: Henri Dolmans, dichter van jubel en smart
AMALGAAM programma
op 2 februari 2016 in wijkcentrum De Poorten, Tilburg om 20:00 in het kader van Week van de Poëzie 2016 met het thema HERINNERING
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Van vrijdag 29 januari tot en met vrijdag 18 maart is onder de naam Dubbeltalent De Rijke Buit in de Groninger Forum Bibliotheek een bijzondere expositie te bekijken met abstract, expressionistisch, figuratief, grafisch, kleurrijk, monochroom en bovenal hartstochtelijk werk van dichters en schrijvers die hun beeldende kant laten zien.
Er valt werk te aanschouwen van de auteurs annex beeldend kunstenaars René Alberts, Liesbeth Annokkee, Mowaffk Al-Sawad, Maria Barnas, Bert Bevers, Frans Budé, Jan Cremer, Koos Dalstra, Tom van Deel, Remco Ekkers, Lies Van Gasse, Annemieke Gerrist, Kees van der Hoef, Wim Hofman, Kamagurka, Freda Kamphuis, Jan Ketelaar, Bas Kwakman, Joke van Leeuwen, Peter M. van der Linden, Renée Luth, George Moormann, Yvon Né, Arjen Nolles, Joost Oomen, Maria van Oorsouw, Martijn den Ouden, Heleen van Royen, K. Schippers & Kees Hin, Jürgen Smit, Rense Sinkgraven, Maartje Smits, Frank Starik, Aafke Steenhuis, Vrouwkje Tuinman, Andrea Voigt, Hans Wap, Helen White en Titi Zaadnoordijk.
De expositie wordt op donderdag 28 januari om 16.30 uur geopend door Marte Röling.
De tentoonstelling is tijdens de reguliere openingstijden van de bibliotheek gratis te bekijken tot en met vrijdag 18 maart in het Groninger Forum aan de Oude Boteringestraat in Groningen.
De werken zijn vanaf 29 januari ook online te zien op www.terborg.com.
Dubbeltalent De Rijke Buit in Forum Bibliotheek Groningen
# website groninger forum bibliotheek
foto boven: Bert Bevers voor de Martinitoren in Groningen
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