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Mireille Havet: Connaissance

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Mireille Havet

(1898-1932)

Connaissance

À la comtesse Jean de Limur

 

La vie souple, comme une cravache

en plein visage m’a flagellée.

 

Je m’en vais douce, inoffensive

dans le crépuscule printanier

qui emplit les rues de jeux de billes,

de marelles étoilées.

 

La lampe

allumée sur le potage,

les faïences,

tel qu’on aurait pu être,

 

Mais la vie trop souple

de sa fine lanière cingle

les enfants tristes,

et l’âme se plie féline,

domptée

vers la mort qui est sa récompense.

Les enfants du cordonnier

jouent dans la cour

avec des cris qui montent

rappelant des hangars, des faubourgs ;

un arbre bouge tout pointé

de bourgeons verts

et mes larmes sourdes et tenaces

sont prises en moi,

source merveilleuse qui chemine

et s’en va

sous la terre

 

s’épuiser au long des larmes stériles

de l’amour,

sous la lune grise

qui annonce la belle saison,

les mains enlacées

les lents et balancés

retours à la maison

— la nuit —

au matin l’aubépinier entier s’était fleuri,

et contre moi

comme une bête,

comme un ange terrassé

j’étrangle ma joie d’hier

neuve, insolente

et dont j’aimerais mourir

 

Ô solitude

magnifique et suprême

que ton dur visage

se mesure bien à mon regard,

face à face comme toujours,

mon âme nue se déploie

au silence des larmes.

 

Toute ma jeunesse me tire cependant

m’entraîne,

dans l’incroyable

foule humaine

et je reprends la chaîne qui nous lie

à la terre.

Il n’y a rien d’autre,

le pain quotidien

le travail

la jouissance étonnante

du chagrin

qui ressemble à la mer.

 

Nous mourons d’espoirs,

de nuances douces couleur de lilas

et plus fragiles encore au contact

des doigts

que le bleu effronté des papillons des îles.

 

Le coup direct ne tue pas si bien

que l’aiguillon secret

qui taquine en silence,

hameçon subtil

glissé dans l’eau

entre les tiges de lotus blancs.

Promenades en bateau,

première étoile

naissante

et qui éclate comme une fleur

à l’horizon des anges,

Vénus au nom de malheur.

J’ai tout vu

le balancement des rames

au fil du courant,

la main douce dans la petite vague

le charme des femmes

leur tendresse navrante

caprice sentimental d’un instant

ont perdu mon âme

qui cherchait leur douceur.

Hamlet, Ophélie, les deux pigeons.

Je poursuis le dérisoire visage de l’amour

au seuil condamnable

au seuil écolier

de mes vingt ans.

 

Très menteuse et très chère

je vous dédie et je vous signe

ce poème,

vous y retrouverez

tout ce que vous détestez en moi

et même le peu que vous aimiez.

Le jeu est fini

la comédie terminée,

je m’en retourne

front lourd et jambes rompues

vers mon enfance

à la poursuite de la lumière

que vous m’avez empoisonnée.

Ô menteuse

la plus cruelle,

souriez à l’éternelle méchanceté humaine

qui me fit en neuf jours

votre petit arlequin bariolé

et ce soir le pierrot balafré

qui vous quitte

visage blanc camouflé de gifles

dans l’incohérence crépusculaire

et douce

du printemps.

 

La Revue européenne n°3 (1er mai 1923)

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Mireille Havet: Le voyage

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Mireille Havet

(1898-1932)

Le voyage

 

Hier, j’ai rencontré le voyage.

Il m’a dit bonjour. Il m’a dit : viens-tu ?

Son beau train flambant soufflait, sur les rails comme le cheval qui piaffe entre les rênes sûres.

Il m’a dit : regarde, le ciel lavé d’après les grêles d’avril est ouvert à la sortie du hall et voici déjà la campagne offrant les deux paumes de ses plaines, les longues sentes effilées de ses doigts accrochés aux forêts mitoyennes et ses ongles purs où sourit une étoile, qui sont les lacs, les fontaines, les abreuvoirs au seuil des fermes et la source jaillissante qui s’égrène entre la haie de crocus.

Va ! Prends la portière, ne consulte point d’indicateur, Toutes les heures sont belles et toutes les lignes sont bonnes… Si tu es un conquérant, il n’y a que le voyage !

Et je suis restée immobile et timide.

Le beau train dans la gare a sifflé… Son dernier wagon sur la voie qui tourne s’en est allé, tremblant comme un grelot noir.

Au retour, la ville me parut plus meurtrière encore. Je toussais le long de ses quais interminables. Enfant Prodigue qui avait refusé l’espace comme on renvoie un chien errant.

J’ai repris la routine des jours, l’oisiveté qui dévore plus que l’amour… Le grand licol de la ville baille autour de mon cou et cependant je n’ai pas su m’enfuir, craignant peut-être la solitude et la rencontre de mon âme que je veux croire perdue ?

Mais, au tournant de la rue, entre deux voitures qui se heurtaient, je l’ai rencontrée, mon âme. Elle sautait devant moi comme une petite fille folle et ses deux mains tremblantes se secouaient dans l’air. Elle avait cependant un tablier rosé… On aurait dit une meurtrière de huit ans. Comme j’allais l’atteindre, un camion m’en à séparée,… dès qu’il fut passé, je bondis, mais hélas je ne trouvai plus, planté dans l’herbe courte des Champs-Elysées, qu’un petit coquelicot maigre et ardent qui battait de la crête comme un petit coq malade.

Alors, je suis passée, prononçant des mots de tristesse vagues et mouvants comme des algues et qui se perdirent dans la rumeur de la ville, s’unissant au cri perpétuel de Paris qui nous enfarine, afin d’en poudrer son ciel clair, nos rêves les plus beaux, nos chairs les plus fines et nos désirs avortés d’univers.

Paris 1918

 

Revue Les Écrits Nouveaux Tome III – N°20 (Aout 1919)

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Mireille Havet: Sur un tableau cubiste

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Mireille Havet

(1898-1932)

Sur un tableau cubiste

 

Et mon rêve s’est penché sur le tableau cubiste

Harmonieux comme lui il a pris la forme profonde

de ses courbes.

Plus rien

Mon rêve oublie le monde, il s’enfonce et l’espace entier

fait place à ma pensée.

Les choses ne sont plus… Ah ! qu’importe les CHOSES

comme un arc-en-ciel, elles se décomposent

Prisme d’idée

Prisme de sensation

Réalisation enfin nouvelle d’une beauté simplifiée

comprise et universelle.

Vie simple

Sonorité sans limite

lumière ronde de ces lignes et s’emboîtant dans elle

comme des poupées russes.

 

Oh ! je vois des choses…

non! des lumières… le Paradis quand il était

situé dans le ciel devait avoir de ces profondeurs :

morceau de clarté jaillissante me faisant penser

à une tasse de porcelaine blanche au milieu d’un

crépuscule printanier.

Ombre divinement infinie

Ombre où l’on tombe comme une âme après la mort

doit tomber dans l’éternité.

Et mon rêve et moi-même sont entrés dans ces formes,

tels des pierres dans une maison neuve

Ne m’appelez plus maintenant, ne me demandez

plus rien de la vie : je pars — je suis partie

navire lointain sur la mer sans fin

On ne rappelle pas un navire. On ne rappelle pas

une pensée

et combien de sifflets, ce soir, annoncent des départs

auxquels vous ne songez.

 

Mireille Havet: Sur un tableau cubiste  (‘ La culture physique ‘ de Picabia, exposée aux Indépendants en 1914)

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Irish Poet Seamus Heaney has died

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Irish Poet Seamus Heaney has died

Seamus Heaney, the best Irish poet since Yeats, has died aged 74. Heaney was born near Toomebridge, Northern Ireland. He was a teacher and had a distinguished career in poetry, winning the Nobel prize for literature in 1995.

Heaney had been awarded numerous prizes and received many honours for his work. He recently suffered from ill health.

 

Poetry

1966: Death of a Naturalist, Faber & Faber

1969: Door into the Dark, Faber & Faber

1972: Wintering Out, Faber & Faber

1975: Stations, Ulsterman

1975: North, Faber & Faber

1979: Field Work, Faber & Faber

1984: Station Island, Faber & Faber

1987: The Haw Lantern, Faber & Faber

1991: Seeing Things, Faber & Faber

1996: The Spirit Level, Faber & Faber

2001: Electric Light, Faber & Faber

2006: District and Circle, Faber & Faber

2010: Human Chain, Faber & Faber

 

In Memoriam Seamus Heaney 1939-2013

30 august 2013

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Mireille Havet: À un très petit enfant

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Mireille Havet

(1898-1932)

À un très petit enfant

Pendant la Guerre

 

Le vent qui souffle ! Tu ne t’en occupes pas.

La guerre qui souffle ! Tu ne t’en occupes pas.

Peu à peu tu apprendras

que sur la terre il y a des orages

et la pluie drue pendant des jours.

Peu à peu tu apprendras

que la haine existe vivace et ardente :

Et le désir de tuer des hommes innocents

parfaitement inconnus de nom et de visage

…. qui auraient pu être des frères

si on avait voulu !

Ô Toi ! Né pendant la guerre

la plus folle ! la plus absolue.

Toi ! spectateur impassible et incompréhensif

qui ne jugeras que bien plus tard,

quand seront éteintes les flammes

et balayées les cendres.

Toi ! qui viens pour reconstruire

avec toute la tendresse de ton regard

bien disposé et sans méfiance,

avec tes mains si douces…. et roses

où peu à peu se dessineront

les grandes lignes de l’existence.

Te voici envoyé vers nous,

avec la perspective de ton enfance

inconsciente et échevelée,

pendant que se finira la guerre démente

et que nous planterons nos croix !

Tu ne viens, ni pour pleurer

ni pour souffrir

en quoi que ce soit, du malheur de notre année !

Tu viens, Promesse d’Avenir,

pour établir et contempler la paix !

 

Ô mon petit Enfant,

pour l’instant, dans le soleil,

tu joues avec le sable de cette terre

pour laquelle le sang coule

incompressible depuis des mois !

Et tout à l’heure, quand le soleil dormira

sur nos chantiers de morts,

tu souriras à la lumière de ta veilleuse

entre les voiles de ton berceau blanc.

Tu ne sais rien. Ton âme est close.

Tu es la chrysalide du lendemain.

Et je te regarde, affolée par tant d’innocence

et de certitude.

 

Ta tâche n’est pas la plus douce.

Constructeur parmi les décombres :

Il te faudra aller sans défaillance,

ne pas croire que la vie est mauvaise

parce que la mort fut un instant

la plus forte !

Tout reprendra avec tes soins.

Génération de vie laborieuse et fervente

après notre génération de sacrifices et de croix

— Efflorescence merveilleuse sur nos morts. —

Le soleil se refera d’une clarté éblouissante

et le blé sera haut dans les champs

avec des cigales dedans.

Des maisons blanches seront bâties

au bord des rivières :

au bord de la Meuse, de la Marne, du Rhin !

Et vous saurez être heureux encore

d’un bonheur neuf et vigoureux

comme votre sang d’enfants nés pendant la guerre.

Mais en ce moment : Tu dors,

ignorant la terre, le vent, la lutte ;

tes yeux fermés abritent le secret

de ton âme

qui est bien la plus forte…

avec son rôle à venir

et l’inconscience de son rêve actuel

où se mire l’éternité.

 

La Maison dans l’œil du chat

Paris, éditions Georges Crès & Cie, 1917

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Mireille Havet: Arlequin

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Mireille Havet

(1898-1932)

Arlequin

 

Mon petit Arlequin

si triste sur le divan

dans la journée molle et que creuse l’orage

aux labours du printemps

tu as chu comme une feuille balancée

pétale détachée qui s’envole

En culotte de soie de toutes couleurs

tes jambes fines en lignes coupées

par les ramages

voyant paysage d’une féerie

de mauvais aloi

où les pommes ont des yeux

et les oiseaux trois pattes

Tu étales dans l’argenterie d’un crépuscule

tout balancé de pluie et d’arrosage

ta souplesse infernale

de sauts périlleux et de scandales

Arlequin mon petit camarade

aux gestes de pantin

qui donc aujourd’hui a tenu

la ficelle de ta belle âme

qui donc a tiré l’élastique de tes quatre membres

que je te vois si pâle et si défait

dans ce costume

qui appelle la bâtonnade

d’un pierrot ridicule

 

Les jardins ont versé leurs odeurs

sur la route

toute une procession de marronniers

en fleurs

de lilas doubles et de tulipes

quelqu’hirondelle basse écorcha ses ailes

au rosier

et l’orage s’est ouvert

ronronnant troupeau d’abeilles

au ciel électrique de lumière

 

Alors

abrités par ta maison claire

et mariés d’avance sous le joug diluvien

de l’averse

 

nous avons cherché

toi familier des planches

et des ramages et des fards

et moi voyageur prodigue au mouchoir

à carreaux faisant mon tour de France

la double douceur de nos chairs nerveuses

illuminées par la saison nouvelle

ses aubes claires et ses rossignols

j’entendais ruisseler les gouttières

et s’abreuver la terre molle

où germent les graines potagères

j’entendais rabattus par le vent

les volets claquer au balcon

et ces intermittences de tonnerre

 

Longtemps je garderai aux doigts

le souvenir de ta culotte soyeuse

je te cherchais à travers

l’arc-en-ciel

et l’odeur des géraniums

mon petit frère perdu dans les mascarades

et les confettis

mon petit dévoyé de l’école

que faisons-nous

Et pourquoi pas plutôt l’atlas ouvert

sur nos genoux

ou bien les rois de France

 

Apprendre enfin pour devenir des hommes

Ah ! tu es pris sous moi pris

nous nous entrouvrons sur le néant

du monde

Voilà que chancelle le masque de tes yeux

ta bouche trop rouge

où j’ai mordu l’admirable forme

sa lampe à la main

 

Arlequin est à la fenêtre

son profil ausculte la nuit

la douteuse lumière pose

des ronds ensoleillés

Sur ses hanches satinées

de danseur immobile

et je me tourne inquiet

pour mieux voir

Car dans mon rêve

j’avais ôté son masque

son petit masque de velours

Si bien ajusté

Cependant

à ses joues chaudes

et son visage entier

m’était apparu

 

Arlequin

regarde-moi

du mensonge

dans un arc si pur

Vais-je découvrir enfin le haut de ton visage

car tes pupilles claires

dans l’échancrure noire

Arlequin

vais-je savoir

quel dieu

tu es

Mais

dans la nuit venue

où se dresse sur un nuage tourmenté

la petite serpe de la lune enchantée

qui servit à trancher

tant de pavots magiques

Dans la nuit où se recomposent

les jardins échevelés par la pluie

et leurs odeurs mêlées

jeu de patience que brouilla l’orage

je m’éveille

Aladin

Surpris par un rêve incroyable

Est-il vrai que c’était mon visage

une telle ressemblance est-elle possible

mon visage sous ton masque

que j’embrassai toute une nuit

Bientôt, dit-il, je te quitterai pour toujours

le jeu a duré bien longtemps pour mon arlequinade

je ne sais vraiment ce qu’il m’a pris

entend les coqs qui ouvrent les routes

de l’aurore

II faut que j’aille réjouir les villes

leur petit guignol de planches et d’or

avant que le matin ne ternisse de rosée

mon brillant costume

Il faut que j’aille danser

rejoindre Colombine

et tous les autres

que serait la comédie sans Arlequin

Vraiment que serait la comédie

tu n’y songes pas

 

Il parlait à demi tourné vers la fenêtre

et l’ombre me cachait sa figure

c’est alors que m’étant levé

pour le rejoindre

d’une jambe souple

il sauta

dans le vide

 

Arlequin

le masque détaché par la chute

vient s’abattre oiseau triste

dans mes mains

et je ne vis plus

sur les routes de l’aurore

S’en allant à reculons

avec des gestes de parade foraine

qu’un petit pantin mécanique et bouffon

dont le visage levé

IDENTIQUE AU MIEN

…..souriait obstinément vers le jour

 

 

Revue Les Écrits Nouveaux Tome IX – nr 6  (juin 1922)

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AN DIE FLIEGE – Photos Anton K. – Gedicht: Friedrich Haug

Friedrich Haug

(1761-1829)

An die Fliege

 

Kleine rege Fliege!

Lose Schwärmerin!

Dürstest du, so schmiege

Dich an’s Kelchglas hin!

 

Komm, du bist geladen!

O mein Traubenmost

Soll dein Kehlchen baden

Süß, wie Götterkost.

 

SchlürfeLust und Feuer!

Taumle gar hinab!

Ich bin dein Befreier

Aus dem Nectargrab.

 

Halt! Nicht umgesunken!

Zeche fort in Ruh!

Endlich flattre trunken

Deiner Buhlschaft zu!

 

Sieh! Konfect und Flaschen

Mangeln nicht bei mir.

Wein und Zucker haschen

Sollst du für und für!

 

Ewig Wonneschweben

Zwischen Überfluß

Sey dein Sommerleben,

Ewiger Genuß.

 

Denn mit Sturmgeheule

Bricht derWinter ein.

Ach, in kurzer Weile

Wirst du nicht mehr seyn;

 

Nimmer fröhlich wärmen

Dich im Sonnenstrahl,

Nimmer naschend schwärmen

Um mein Königsmahl;

 

Lüstern buhlen nimmer,

Durch dein Brüderheer

Deiner Flügel Schimmer

Schütteln nimmermehr!

 

Lieber Himmel walte!

Ich beweine dich,

Und ich Thor verhalte

Thränen über mich?

 

Nein! die Thränen glänzen!

Lust zerrinnt im Nu.

O! Nach dreißig Lenzen

Bin ich todt, wie du!

 

 

Photos: Anton K. 2009

Gedicht: Friedrich Haug

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Arno Holz: Ballade

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Arno Holz

(1863–1929)

 

Ballade

 

Kennt ihr das Lied, das alte Lied

Vom heilgen Hain zu Singapur?

Dort sitzt ein alter Eremit

Und kaut an seiner Nabelschnur.

Er kaut tagaus, er kaut tagein

Und nährt sich kärglich nur und knapp,

Denn ach, er ist ein grosses Schwein

Und nie fault ihm sein Luder ab!

Rings um ihn wie das liebe Vieh

Wälzt sich zerknirscht ganz Singapur

Und »Gott erhalte«, singen sie,

»Noch lange seine Nabelschnur!«

Denn also geht im Volk die Mähr

Und also lehrt auch dies Gedicht:

Wenn jene Nabelschnur nicht wär,

Dann wär auch manches Andre nicht.

Dann hätte beispielsweise Lingg

Nie völkerwandernd sich verrannt

Und Wagners Nibelungenring

Wär stellweis nicht so hirnverbrannt.

Uns hätte nie Professor Dahn

Urdeutsch dozirt von A bis Z

Und kein ägyptischer Roman

Verzierte unser Bücherbrett.

Wolffs Heijerleispoeterei,

Kein Baumbach wär ihr nachgetatscht,

Und Mirzas Reimklangklingelei

Summa cum laude ausgeklatscht.

Dann schlüge endlich unsrer Zeit

Das Herz ans Herz der Poesie,

Das Rütli schwüre seinen Eid

Und unser Tell wär das Genie.

So aber so – frei, fromm und frisch

Kaut weiter jener Nimmersatt;

Sein eigner Schmerbauch ist sein Tisch,

Sein –wisch ein Bananenblatt.

Und um ihn wie das liebe Vieh

Wälzt sich zerknirscht ganz Singapur

Und »Gott erhalte«, singen sie,

»Noch lange seine Nabelschnur!«

 

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Théophile Gautier: Coquetterie posthume

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Théophile Gautier

(1811-1872)

 

Coquetterie posthume

 

Quand je mourrai, que l’on me mette,

Avant de clouer mon cercueil,

Un peu de rouge à la pommette,

Un peu de noir au bord de l’oeil.

 

Car je veux dans ma bière close,

Comme le soir de son aveu,

Rester éternellement rose

Avec du kh’ol sous mon oeil bleu.

 

Pas de suaire en toile fine,

Mais drapez-moi dans les plis blancs

De ma robe de mousseline,

De ma robe à treize volants.

 

C’est ma parure préférée ;

Je la portais quand je lui plus.

Son premier regard l’a sacrée,

Et depuis je ne la mis plus.

 

Posez-moi, sans jaune immortelle,

Sans coussin de larmes brodé,

Sur mon oreiller de dentelle

De ma chevelure inondé.

 

Cet oreiller, dans les nuits folles,

A vu dormir nos fronts unis,

Et sous le drap noir des gondoles

Compté nos baisers infinis.

 

Entre mes mains de cire pâle,

Que la prière réunit,

Tournez ce chapelet d’opale,

Par le pape à Rome bénit :

 

Je l’égrènerai dans la couche

D’où nul encor ne s’est levé ;

Sa bouche en a dit sur ma bouche

Chaque Pater et chaque Ave.

 

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VPRO BOEKEN zo 10 maart 2013 Tineke Cleiren & Theodor Holman

VPRO BOEKEN

Tineke Cleiren & Theodor Holman

Zondag 10 maart 2013 om 11.20 uur op Nederland 1

 

Tineke Cleiren en Antoine Hol: Strafrecht, tussen ratio en emotie

De Leidse hoogleraar strafrecht Tineke Cleiren schreef samen met haar man Antoine Hol, eveneens jurist, eveneens hoogleraar, het boek Strafrecht, tussen ratio en emotie. Het werd een boek waarin Cleiren uitlegt wat recht eigenlijk is, waar het voor staat en waar op dit moment in onze samenleving de knelpunten zitten.

Strafrecht, tussen ratio en emotie is een boek geworden dat uitlegt dat een goed functionerend strafrecht laveert tussen ratio en emotie, in plaats van een van die twee kanten te kiezen. Het beantwoordt vragen over eigenrichting, slachtofferschap, vergelding, verwerking en volksgerichten. Bijvoorbeeld legt het uit dat Officieren van Justitie niet alleen maar ‘crimefighters’ zijn die zorgen voor belastend bewijsmateriaal, maar dat ze ook voor ontlastend materiaal moeten zorgen. Alle denkbare paden moeten gevolgd worden, en aan iedere zaak zitten twee kanten. Hoe dit in de praktijk werkt, legt Cleiren zondag uit.

holman vproboeken

Theodor Holman: De grootste truc aller tijden

Schrijver Theodor Holman wist vrijwel niets van de Tweede Wereldoorlog in Nederlands-Indië. Daar kwam hij achter toen hij twee jaar geleden een redevoering hield bij een herdenking. Zijn ouders en zijn zus zaten in een jappenkamp, maar zijn ouders konden de woorden niet vinden om er goed over te vertellen en de jonge Theodor sloot zich af voor de verhalen. Nu maakt hij het goed, met De grootste truc aller tijden schreef hij een Indische familiegeschiedenis.

In de nalatenschap van zijn ouders vond hij het kampdagboek van zijn vader. Een klein, beduimeld boekje van pakpapier waarin zijn vader in priegelig handschrift zijn belevenissen aan de Birma-spoorlijn neerschreef. Achterin het boekje had zijn vader, die een niet onverdienstelijk goochelaar was, alle kaarttrucs die hij kende opgeschreven. De schrijver had zijn invalshoek gevonden en vertelt aanstaande zondag over zijn nieuwe boek, dat gaat over de ‘illusies die het leven ons flikt’.

Meer informatie op website: ≡  VPRO BOEKEN

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In Memoriam Tsjêbbe Hettinga (1949 – 2013)

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In Memoriam

Tsjêbbe Hettinga

(1949 – 2013)

Op 7 maart 2013 is in Leeuwarden de Friese dichter Tsjêbbe Hettinga overleden in. Vanaf zijn jeugdjaren kampte hij met een beperkt gezichtsvermogen.  Desondanks trad hij vaak op tijdens poëzieavonden en literaire festivals. In december vorig jaar werd kanker bij hem geconstateerd.  Hij werd vierenzestig jaar.

Hettinga groeide op als boerenzoon, op het Friese platteland. Hij volgde de kweekschool en studeerde in Groningen Nederlands en Fries. De afgelopen dertig jaar woonde hij in Leeuwarden. Tsjêbbe Hettinga heeft meer dan tien dichtbundels geschreven in de Friese Taal. Hij werd het boegbeeld van de Friese literatuur. Er is ook werk van hem vertaald in het Nederlands (Benno Barnard) en het Engels (James Brockway en Susan Massotty). In 2010 schreef Tsjêbbe Hettinga de Nationale Gedichtendagbundel.

Meer informatie op: ≡ Fryske literatuerside

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Théophile Gautier: Bûchers et tombeaux

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Théophile Gautier

(1811-1872)

 

Bûchers et tombeaux

 

Le squelette était invisible,

Au temps heureux de l’Art païen ;

L’homme, sous la forme sensible,

Content du beau, ne cherchait rien.

 

Pas de cadavre sous la tombe,

Spectre hideux de l’être cher,

Comme d’un vêtement qui tombe

Se déshabillant de sa chair,

 

Et, quand la pierre se lézarde,

Parmi les épouvantements,

Montrait à l’oeil qui s’y hasarde

Une armature d’ossements ;

 

Mais au feu du bûcher ravie

Une pincée entre les doigts,

Résidu léger de la vie,

Qu’enserrait l’urne aux flancs étroits ;

 

Ce que le papillon de l’âme

Laisse de poussière après lui,

Et ce qui reste de la flamme

Sur le trépied, quand elle a lui !

 

Entre les fleurs et les acanthes,

Dans le marbre joyeusement,

Amours, aegipans et bacchantes

Dansaient autour du monument ;

 

Tout au plus un petit génie

Du pied éteignait un flambeau ;

Et l’art versait son harmonie

Sur la tristesse du tombeau.

 

Les tombes étaient attrayantes:

Comme on fait d’un enfant qui dort,

D’images douces et riantes

La vie enveloppait la mort ;

 

La mort dissimulait sa face

Aux trous profonds, au nez camard,

Dont la hideur railleuse efface

Les chimères du cauchemar.

 

Le monstre, sous la chair splendide

Cachait son fantôme inconnu,

Et l’oeil de la vierge candide

Allait au bel éphèbe nu.

 

Seulement pour pousser à boire,

Au banquet de Trimalcion,

Une larve, joujou d’ivoire,

Faisait son apparition;

 

Des dieux que l’art toujours révère

Trônaient au ciel marmoréen ;

Mais l’Olympe cède au Calvaire,

Jupiter au Nazaréen ;

 

Une voix dit : Pan est mort ! – L’ombre

S’étend. – Comme sur un drap noir,

Sur la tristesse immense et sombre

Le blanc squelette se fait voir ;

 

Il signe les pierres funèbres

De son paraphe de fémurs,

Pend son chapelet de vertèbres

Dans les charniers, le long des murs,

 

Des cercueils lève le couvercle

Avec ses bras aux os pointus ;

Dessine ses côtes en cercle

Et rit de son large rictus ;

 

Il pousse à la danse macabre

L’empereur, le pape et le roi,

Et de son cheval qui se cabre

Jette bas le preux plein d’effroi ;

 

Il entre chez la courtisane

Et fait des mines au miroir,

Du malade il boit la tisane,

De l’avare ouvre le tiroir ;

 

Piquant l’attelage qui rue

Avec un os pour aiguillon,

Du laboureur à la charrue

Termine en fosse le sillon ;

 

Et, parmi la foule priée,

Hôte inattendu, sous le banc,

Vole à la pâle mariée

Sa jarretière de ruban.

 

A chaque pas grossit la bande;

Le jeune au vieux donne la main ;

L’irrésistible sarabande

Met en branle le genre humain.

 

Le spectre en tête se déhanche,

Dansant et jouant du rebec,

Et sur fond noir, en couleur blanche,

Holbein l’esquisse d’un trait sec.

 

Quand le siècle devient frivole

Il suit la mode; en tonnelet

Retrousse son linceul et vole

Comme un Cupidon de ballet

 

Au tombeau-sofa des marquises

Qui reposent, lasses d’amour,

En des attitudes exquises,

Dans les chapelles Pompadour.

 

Mais voile-toi, masque sans joues,

Comédien que le ver rnord,

Depuis assez longtemps tu joues

Le mélodrame de la Mort.

 

Reviens, reviens, bel art antique,

De ton paros étincelant

Couvrir ce squelette gothique ;

Dévore-le, bûcher brûlant !

 

Si nous sommes une statue

Sculptée à l’image de Dieu,

Quand cette image est abattue,

Jetons-en les débris au feu.

 

Toi, forme immortelle, remonte

Dans la flamme aux sources du beau,

Sans que ton argile ait la honte

Et les misères du tombeau !

 

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