Aloysius Bertrand: Harlem
A l o y s i u s B e r t r a n d
(1807-1841)
Harlem
Harlem, cette admirable bambochade qui résume l’école
flamande, Harlem peint par Jean-Breughel, Peeter-Neef,
David-Téniers et Paul Rembrandt.
Et le canal où l’eau bleue tremble, et l’église où le
vitrage d’or flamboie, et le stoël* où sèche le linge
au soleil, et les toits, verts de houblon.
Et les cigognes qui battent des ailes autour de l’horloge
de la ville, tendant le col du haut des airs et recevant
dans leur bec les gouttes de pluie.
Et l’insouciant bourguemestre qui caresse de la main
son double menton, et l’amoureux fleuriste qui maigrit,
l’oeil attaché à une tulipe.
Et la bohémienne qui se pâme sur sa mandoline, et le
vieillard qui joue du Rommelpot**, et l’enfant qui enfle
une vessie.
Et les buveurs qui fument dans l’estaminet borgne, et
la servante de l’hôtellerie qui accroche à la fenêtre un
faisan mort.
(*) balcon de pierre
(**) instrument de musique
Aloysius Bertrand poetry
kempis.nl = kempis poetry magazine
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